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From ME to who wants

Courtes nouvelles, états d'âmes, poésies, vie de maman, et quelques clins d'oeil. Tout est dans le texte :-)

23 Octobre

Tu as pleuré ?

- Non.

- Si, tu as pleuré, je le vois bien.

- Oui, peut-être, un peu.

- Qu'est ce qu'il se passe ?

- C'est à cause de la date. Aujourd'hui, c'est son anniversaire. Il a 87 ans. 87, tu te rends compte ? Je crois que j'ai un problème avec le temps qui passe. Tu aimes quelqu'un, toute ta vie, tous les jours, et puis un matin, un soir, il n'est plus là, et toi, tu l'aimes encore. Tu restes avec tout ton amour, là sur les bras, tu en avais encore pour des milliers d'années, et...

- Tu sais, il est encore là.

- Oui, je sais bien. Mais dans quel monde vit-on ? Il y a le virtuel, bien sûr, une béquille... Je pense à tous ceux qui me manquent. Qui lui manquent. Je pense à tous ceux qui sont séparés, qui s'écartent par amour. Pour éviter le danger, garder les proches à distance - la quadrature du cercle des proches disparus ? Je pense à la vacuité des heures perdues, celles que l'on ne donne pas à ceux qui comptent. Je pense à ceux qui comptent celles qui restent, aussi. Tout cela passe beaucoup trop vite, dans un changement permanent, quand il ne reste que cette nostalgie dont on nous dit qu'il faut se défaire pour avancer - mais avancer vers où ? et avancer pour quoi... Je veux bien faire semblant d'être forte tout le temps, pour les enfants. Mais quand je suis seule, des fois...

- Il le sait, combien tu l'aimes ?

- Bien sûr qu'il le sait. Heureusement ! J'ai appris à le formuler, à le faire passer, aussi avec des mots, même quand c'est évident. Mais, cela ne change pas grand chose, au final... Regarde, j'ai accumulé une vie entière d'amour, elle déborde déjà, tu imagines tout ce qui va continuer à déborder, pendant toutes les années qui resteront, ensuite ? 

- Tu es déjà triste d'un chagrin qui n'existe pas encore.

- Je suis désemparée par l'inflexibilité de la pendule. Je suis fragile devant l'incertitude, je vois à chaque instant s'éloigner l'horizon des jours meilleurs - il ne me plait pas, ce chemin où les départs sont plus nombreux que les arrivées. Je ne veux pas que meurent les gens que j'aime. Je ne veux pas que souffrent ceux qui m'importent. Mais ces caprices n'émeuvent jamais les jeux du hasard quotidien, ni sa tranquille cruauté. 

- Il existe d'autres passages que cette anticipation. Garde la nostalgie, tu peux t'en faire un manteau. Même un doudou. Garde l'espoir, il ne coûte rien mais apporte beaucoup. Garde l'amour, bien sûr, il est toujours une source de lumière. Garde la poésie, elle transcende jusqu'au temps. Et puis, garde bien vif ce pétillement doux au creux de tes paupières. C'est la matière première des étoiles, tu sais, lorsque les yeux sont fermés. Pendant le sommeil, elles brillent, elles s'habituent à cette présence ; quand il est temps, elles étincellent pour toujours. Dans la nuit du chagrin, elles sont toutes à veiller - les soleils lointains de tous ceux dont la vie nous éclaire, ou nous a éclairé. Alors prends soin de tes paillettes. Quand tu les mouilles, il pleut dans mon coeur. Allez, viens dans mes bras, j'ai un câlin pour toi.

Et puis, pour lui, du fond du coeur : Joyeux Anniversaire.

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